Hommage à Pierrot … par JC BRONDANI

Pierre LEPAGE

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Hommage posthume – le 22/05/2012

“Pierrot, mon ami, c’est à toi que je veux m’adresser personnellement. Nous sommes nombreux aujourd’hui à t’accompagner dans ton dernier voyage.

Quelques uns sont au désespoir de ne pas pouvoir être présents physiquement, mais pensent en ce moment même très fort à toi :

  • Christine THOMAS-PELLETIER, la fille de notre Maître, retenue par des obsèques familiales
  • Pierre ALBERTINI, Président de L’« Amicale des Internationaux de Judo », dont tu faisais partie,
  • Guy DUPUIS, ancien président du Collège des Ceintures Noires

Et parmi les Minet’boys :

Alain NALIS, Didier CHOUCAVY, Luc RUCORT, Laurent VILLIERS, Nicole et André ANDERMATT, Hélène GALAN, Pierre NARQUIN, Jean-Paul FOURTICQ, Eric WAIRON

et bien d’autres que j’oublie et que je prie de m’excuser….

Pierrot, toi qui t’es toujours comporté en ami fidèle et attentif, tu viens de nous faire ton premier sale coup en nous abandonnant ainsi, brutalement. Tu laisses tes nombreux amis devant un vide abyssal. Tes élèves sont orphelins. Ils ne s’entendront plus jamais traités affectueusement de « bons à rien » de « bandes de tâches ».…

Ce sont tes propres mots. Ils n’auront plus désormais sous leurs yeux admiratifs l’image du judo qu’ils rêvent de réaliser et que tu représentais si bien.

Pierrot, mon ami, je t’ai connu dans les années 60, au Judo-Club Saint-Martin. J’étais à peine ceinture noire. Tu étais toi dans la pleine possession de tes moyens physiques et techniques, dans la force de l’âge. Tu revenais d’effectuer ton service militaire en Algérie où t’avait accueilli ton grand ami Robert PICARD, ancien international et grand professeur installé à Alger.

Malgré tes 70 kilos tout mouillés, tu ne craignais personne sur le tatami. Sur les tapis de la rue Notre Dame de Nazareth, tu enchaînais les randoris avec les gros et les petits sans distinctions : les SOLAVIN, les BRISKINE, les PACHOT, les FERLET, les CHEVALIER, les MARTIN, les MENOU, les FOURNIER, les AUBOUY. Parmi tous ces seigneurs, je cherchais ma voie et en attendant de la trouver, j’aérais la salle « en faisant le ventilateur ». Ceux qui étaient là savent ce que cela veut dire. C’était un festival de De Ashi Barai, de Tai otoshi, de O Uchi Gari, d’enchaînements, de confusions, de combinaisons…mais pas de « contres »…Pas de cela chez nous… Seule, l’attaque était noble.

Tout le premier étage de ce qui était auparavant une salle de cinéma résonnait du bruit des chutes. Les Judoka remplissaient toute la surface mais celui que l’on suivait du regard, c’était toi. Tes déplacements étaient rapides, magiques. Tu avais toujours un temps d’avance mais tu savais aussi prendre un temps de retard pour mettre ton partenaire dans le vent et placer ton attaque dans le bon tempo sans effort apparent, sans dépense inutile d’énergie. Tu étais celui qui savait le mieux illustrer dans la pratique, les cours lumineux de notre Maître Guy PELLETIER, aujourd’hui disparu. Tu étais l’emblème vivant de notre école, celle du Judo Kodokan initiée en France par le Maître Ichiro ABE. Tu étais le plus bel exemple de la troisième génération de cette école. Après Claude MALLET, Maurice GRUEL, qui nous ont quittés eux aussi, tu restais probablement jusqu’à ces derniers jours, un des plus anciens élèves du Maître, encore vivants.

Dans les années 60-70, je t’ai sollicité pour venir transmettre ta science du Judo aux élèves du Gant d’Or de Houilles. Bientôt rejoint par ton inséparable alter ego, Félix CHEVALIER, vous avez à tous les deux, enchanté pendant 40 ans vos élèves, sur lesquels vous avez imprimé votre marque de façon indélébile. Certains comme Bruno RENARD qui t’a succédé à Houilles, sont devenus eux aussi enseignants et perpétuent la tradition du Judo Kodokan. Tu es également intervenu à l’école fédérale des cadres pour former des enseignants diplômés d’état.

Ceux qui t’ont bien connu, gardent de toi l’image d’un personnage haut en couleur, avec ta gouaille de titi parisien, ton jean élimé et tes « santiags » de cow-boys, et surtout ton inséparable moto. Sous tes airs détachés et bourrus, tu cachais une immense sensibilité. Tu étais en fait, un grand affectif, fidèle et chaleureux en amitié, le cœur sur la main, toujours disponible pour ses amis, prêt à rendre visite à un de tes élèves malades ou blessés (Pascal SARAZIN, Catherine GAUCHE, et bien d’autres encore s’en souviennent très clairement). Tu avais été scout dans ton enfance et en avais gardé l’empreinte profonde du service des autres.

Pierrot, mon ami, tu avais fait de ton Judo plus qu’un sport : un Art. Ta recherche du beau, ton sens esthétique était probablement d’origine génétique, puisque professionnellement, tu étais restaurateur de tableaux, métier qu’exerçait avec toi, ton frère Paul, également judoka, aujourd’hui disparu, et avant vous, votre propre père. Tu n’avais pas ton pareil pour rentoiler, retoucher et redonner une seconde jeunesse à une vieille croûte que l’on croyait définitivement perdue. Il y avait là comme un mystère, lié à la transmission familiale de secrets de fabrication . Je me suis laissé dire que tu avais acquis dans ce domaine professionnel une notoriété nationale et même internationale.
En résumé tu étais le même dans ton atelier et sur le tatami. Avec une modestie et une humilité dont tu ne te départissais jamais, tu étais un Maître au sens où tu avais acquis une maîtrise souveraine de l’Art du Judo comme de l’Art de la restauration.

Aujourd’hui nos pensées vont vers Patricia et Laurence, tes deux filles, et tes petits enfants, auxquels tu étais tendrement attaché. Devant eux comme pour ta famille, tes amis, tes élèves, tu laisses aujourd’hui un grand vide, qui ne se comblera jamais…

Au revoir Pierrot,

Adieu mon Ami,

Salut l’Artiste ! »

Jean-Claude BRONDANI

 

Pierre LEPAGE, “Tonton Pierrot”

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Tonton Pierrot, comme nous avions l’habitude de l’appeler était 6ème dan FFJDA et Kodokan
Il laisse un grand vide au sein de la section Judo et du Gant d’Or

Au nom de tes élèves, et ils sont très nombreux : 

Au revoir senseï